Mercredi 9 janvier 2008 -L’Independant 66
FAITS DU JOUR
De son yacht dans les Balkans il livre sa version de
l'affaire Hermeline
Pascal Fernandez a été mis en examen en 2004 dans l'affaire du
liquidateur judiciaire perpignanais Franck Hermeline. Pour que
"tous les coupables soient jugés", il nous livre ses aveux
complets sur toute cette fraude organisée aux liquidations
d'entreprises qui avait défrayé la chronique locale.
Aujourd'hui, je vais vous raconter la vraie histoire de Maître Hermeline.
Je vais peut-être m'attirer les foudres mais je n'ai plus rien à perdre.
Je suis parti de France, je ne vois pas ma femme et mes enfants. Je
suis tout seul. Je me rendrai à la justice, oui. Je ne me mettrai pas en
cavale mais je ne me rendrai pas tant que tous les coupables ne
seront pas à mes côtés à la barre."
Exilé après s'être soustrait au contrôle judiciaire imposé par la justice
des P.-O., Pascal Fernandez a décidé aujourd'hui depuis son yacht qui
navigue selon un itinéraire tenu secret au large des Balkans, de nous
faire ses "aveux intimes et entiers" sur l'affaire qui voilà quatre ans a
défrayé la chronique perpignanaise . "Dire la vérité" pour larguer les
amarres "à l'aube d'une nouvelle vie" (lire ci-dessous).
"Tout commence en 1998 à Saint-Cyprien. A cette époque, je viens
d'arriver dans les P.-O. parce que mon grand-père est originaire de làbas.
J'ai ouvert une petite agence sur le port qui s'appelle Catalunya
Marine où je loue des bateaux à moteur et deux yachts. Mon père me
sollicite pour prêter des bateaux ou faire des prix à son relationnel et là
il me dit : "un mandataire judiciaire vient d'arriver de Paris avec sa
femme et je veux que tu le soignes. Il me dit : "Ça mon pote, c'est le
loto. Je vais te montrer comment on fait des affaires". Très vite,
Frank Hermeline arrive avec sa femme et on sympathise. ll me fait un
sourire et me dit "on se reverra j'espère".
La première liquidation
"On se revoit et il me propose la première liquidation judiciaire. Ça
s'appelle "Défi", une société de films pornographiques, ça avait fait
beaucoup de bruit dans les P.-O. Moyennant 10 000 euros en espèces,
on récupère une voiture, des biens, quelques armoires, pas grandchose
en fait mais ça génère quelque profit. Puis il me dit qu'il paye un
maximum d'impôt et qu'il faudrait qu'il fasse quelques travaux dans sa
maison. Le but de l'opération c'est donc de lui remettre sa maison à
neuf. En échange d'argent, il nous fait tomber des liquidations
judiciaires."
"Sauver le juge..."
"Puis, un vendredi, mon père m'appelle et me dit, on a un problème et
il faut que tu viennes. Il me dit : "un juge-commissaire du tribunal de
commerce de Perpignan va se retrouver en faillite. Il a fait de très
mauvaises affaires, il perdrait tout ce qu'il a, le bateau, les
appartements, les SCI, les immeubles.... Donc, il faut le sauver. Si on
fait ça, qu'est-ce qui se passe ? Il donnera toutes les liquidations
judiciaires à notre copain Franck Hermeline et là on se met du grain
dans la poche. Donc, c'est très simple." "Les nombreuses sociétés qui
appartiennent au juge-commissaire, sont mises au nom de ma tante
qui vit dans un HLM à Toulouse et qui ne gagne pas un franc et au nom
de ma grand-mère, 84 ans.
Petite cuisine entre amis
"Pour sortir le juge et sa femme de ce bourbier, on change de gérant,
on fait un transfert dans le 93 dans un local de 10 m2 avec l'aide d'un
avocat parisien, grand copain de Franck Hermeline, et on attend avant
de faire un beau petit dépôt de bilan. Entre amis, sans faire de bruit,
on se fait notre petite cuisine. Et on sauve le juge. L'accord est trè s
simple. Tout est décidé le dimanche autour d'un barbecue, chez mon
père, avec le juge du tribunal de commerce, qui était sauvé, un autre
juge et un de leur ami intime qui est juge rapporteur. Le but est de
donner qu liquidateur le maximum de liquidations judiciaires pour s'en
mettre plein les fouilles."
On cache le matériel puis on le revend
" Première liquidation judiciaire juteuse : une entreprise électrique
basée en face du contrôle technique à Saint-Estève. Il y avait des
actifs roulants, alors là nous n'hésitons pas. Un huissier de justice, qui
marche avec nous, fait la visite officielle des actifs. Bien entendu, le
matériel on l'a fait disparaître avant. "On l'a emmené dans le camping
de la femme d'un notaire. On y a stocké les grues, camions, poquelins,
tout ce que l'on peut faire disparaître et qui est en fin de leasing.
Ensuit e, on trouve un gars de Toulouse, qui est en réalité un des
copains de mon père, qui achète la liquidation pour très peu. "L'ancien
propriétaire est de mèche avec nous et on passe tout à la trappe. "A
partir de là, on décide de vendre le matériel roulant, en passant des
annonces hors région. Et là où ils sont très fort, ils n'ont pas hésité :
carrément, ils ont pris les noms de gens décédés qui étaient dans les
liquidations chez Franck Hermeline et ils ont fait faire des papiers. Ils
mettaient un coup de tampon du mandataire das le bureau du
liquidateur et ils allaient faire des cartes grises à la préfecture." "
Depuis que je suis sorti de prison, je n'ai rencontré que trois personnes
honnêtes. Mon avocat, Me. Philippe Nèse, l'inspecteur de la financière
et la première juge d'instruction."
"Tout ça, ça sent pas bon. Des gens de la justice sont mouillés et ce
sont les copains des copains qui sont tous francs-maçons. Je n'ai rien
contre les francs-maçons mais je ne comprends pas comment ils
peuvent garder en leur sein un homme tel que Franck Hermeline,
comment ils peuvent défendre un truc pareil. Mon père a fait ni plus ni
moins un pacte de non agression avec Hermeline."
Pacte de non agression
"Le juge-commissaire n'a jamais été inquiété, ni les autres personnes
impliquées qui dépendent du tribunal de commerce. Mais pourquoi le
juge-commissaire a-t-il vendu pour un euro symbolique une entreprise
de 230 000 euros de capital à deux grands-mères qui sont incapables
de gérer ? Comment le juge donnait les liquidations et les autorisations
? Comment mon père a-t-il pu vendre ses biens et partir en Espagne
sans souci ? Comment le mandataire liquidateur a-t-il pu dire qu'il
n'était pas au courant puisque toutes les liquidations ce sont ni plus ni
moins mes clients ? Tout simplement parce qu'il me disait : "trouve en
dehors de Perpignan, des clients pour racheter". Si cette affaire a
explosé, c'est parce que je lui ai remis 300 000 euros en cash pour une
affaire qui a capoté et qu'entretemps il s'en est servi pour acheter des
actifs aux Canaries. Il m'en demandait toujours plus."
"Je paierai, si..."
"Le jugement devrait intervenir dans le courant du mois de mai. On me
mettra peut-être Interpol aux trousses, mais je ne viendrai pas tant
que que je n'aurai pas vu dans les journaux la mise en examen de tous
ceux qui ont mangé, qui ont croqué, et escroqué impunément des
gens. Parce qu'au début on ne m'a pas dit que l'on allait arnaquer des
personnes âgées ou des gens à la limite du dépôt de bilan. Je ne suis
pas la vierge colombe mais il y a des choses que je me refuse de faire
même pour de l'argent.
Cela fait quatre ans que je remonte et que je fais de l'argent. Ça fait
quatre ans aussi que les impôts me courent après mais je ne paierai
rien tant que les vrais auteurs de ces faits ne recevront pas la punition
qu'ils méritent.
Si c'est le cas, je l'affirme, je paierai toutes les parties civiles qui se
sont retrouvées dans ces liquidations judiciaires et toutes les
personnes qui ont versé des accomptes dans le cadre de ma société
de vente de voitures de luxe."
Propos recueillis par Laure Moysset
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